Nostalgie ou vraie alternative ? L’idée d’un retour aux V10 en F1 refait surface, mais est-ce compatible avec les défis technologiques et environnementaux ?

L’idée d’un retour des moteurs V10 en Formule 1 a ressurgi après une déclaration de Mohammed Ben Sulayem, le président de la FIA. Ce simple sous-entendu a immédiatement enflammé les passionnés, ravivant le souvenir d’une ère où la discipline reine du sport automobile était synonyme de rugissements mécaniques et de performances brutes. Mais au-delà de la nostalgie, une telle évolution est-elle réellement envisageable ?
Un virage à contre-courant des tendances actuelles
Depuis l’introduction des V6 hybrides en 2014, la F1 s’est engagée dans une voie plus technologique et plus respectueuse des contraintes environnementales. Le retour des V10 – voire des V8 – poserait un sérieux problème face aux normes écologiques de plus en plus strictes, notamment en Europe, où la vente de voitures thermiques neuves pourrait être interdite dès 2035.
Toutefois, certains acteurs du sport voient une alternative dans les carburants synthétiques. Ces technologies, en cours de développement, pourraient offrir une solution intermédiaire en permettant d’allier moteurs thermiques et réduction de l’empreinte carbone. Plusieurs compétitions, comme l’Endurance, explorent déjà la piste du moteur à hydrogène, et la F1 elle-même s’est engagée à utiliser du carburant 100 % durable dès 2026.
Des bénéfices économiques et sportifs ?
L’un des principaux arguments en faveur du retour des V10 réside dans la simplification des motorisations. Exit l’hybride, ses coûts faramineux et ses complications techniques qui ont refroidi plusieurs constructeurs. Avec des moteurs plus simples, les coûts pourraient être réduits, rendant l’entrée en F1 plus accessible à de nouveaux motoristes indépendants. Cela pourrait aussi permettre l’arrivée d’une 12ᵉ équipe, une perspective envisagée depuis longtemps mais freinée par les exigences budgétaires.
Au-delà de l’aspect économique, un retour à des moteurs plus simples et plus légers aurait un impact direct sur la conception des monoplaces. Des voitures plus compactes et plus agiles offriraient une meilleure maniabilité et pourraient améliorer le spectacle en piste. En revanche, cela signifierait aussi un éloignement du modèle actuel, où la F1 se positionne comme un laboratoire technologique pour l’industrie automobile.
Un rapprochement avec l’IndyCar ?
Si la F1 choisissait d’abandonner sa quête d’innovation technologique pour privilégier le spectacle, elle pourrait se rapprocher du modèle IndyCar. Aux États-Unis, la discipline repose sur des monoplaces standardisées avec des coûts maîtrisés, ce qui garantit des courses plus disputées. En Europe, une telle approche pourrait être perçue comme une hérésie, mais elle est déjà appliquée dans les catégories inférieures (F2, F3, F4) et même en Endurance avec les LMP2 et LMP3.
Un retour aux V10 impliquerait donc une réflexion plus large sur la direction que veut prendre la F1. Veut-elle rester une vitrine technologique ou redevenir un pur spectacle mécanique ?
Une idée séduisante mais irréaliste ?
Même si l’idée séduit une partie des fans et certains acteurs du paddock, elle se heurte à plusieurs obstacles majeurs :
- Les impératifs écologiques et politiques : difficile d’imaginer la F1 faire marche arrière alors que l’électrification domine les débats.
- L’opposition des constructeurs : Mercedes, Ferrari ou Audi ont investi massivement dans l’hybride et ne verraient pas d’un bon œil un tel retour en arrière.
- La rentabilité : si des motoristes indépendants comme Cosworth pourraient être intéressés, encore faudrait-il qu’un financement solide soit en place.
Le retour des V10 en F1 reste donc, pour l’instant, un sujet de débat plus qu’un projet concret. Avant d’envisager un tel changement, la F1 devra d’abord définir quel avenir elle souhaite se donner. Car entre innovation et nostalgie, il faudra choisir une voie qui soit à la fois économiquement viable et en accord avec les réalités du sport moderne.