Pourquoi Renault pourrait être contrainte de revenir en F1

Les équipes clientes dans le Top 5 du championnat F1 devront peut-être produire toutes leurs pièces d’ici 3 ans. Haas et Racing Bulls parmi les plus concernées.

Article modifié le 15/11/2024 à 21:30 (heure de Paris)

La Formule 1 se prépare à une évolution majeure de sa réglementation pour 2026, avec une règle qui pourrait bouleverser les équipes clientes si elle est adoptée, peut-on lire sur le très sérieux média allemand Auto Motor und Sport. Selon une proposition en discussion, les écuries qui termineraient dans le Top 5 du championnat des constructeurs seraient contraintes de produire l’intégralité des pièces de leurs monoplaces dans un délai de trois ans. Une mesure destinée à limiter leur dépendance aux écuries de constructeur et à favoriser une plus grande autonomie technique.

Actuellement, la F1 compte cinq équipes dites « clientes », qui achètent des pièces à des constructeurs au-delà des blocs moteurs. Parmi elles, Haas, Racing Bulls (associée à Red Bull), Williams, et Aston Martin figurent régulièrement dans la liste des clients notoires. La nouvelle réglementation viserait à éviter que des équipes clientes, grâce à des collaborations techniques poussées, n’accèdent trop facilement aux premières places du classement en profitant des développements réalisés par les constructeurs.

Par exemple, Haas, qui s’appuie fortement sur Ferrari pour ses pièces depuis son arrivée en F1 en 2016, pourrait être particulièrement impactée. Actuellement septième au championnat, l’écurie américaine a déjà exprimé son mécontentement face à cette règle. Une source interne a indiqué que cela nécessiterait une montée en puissance importante, notamment en termes de personnel et d’infrastructures, pour atteindre l’autonomie totale exigée.

Racing Bulls, la « petite sœur » de Red Bull, pourrait également être visée par cette mesure. Depuis plusieurs années, les liens entre les deux équipes se resserrent, avec un transfert croissant de technologies et de pièces. Dès 2025, Racing Bulls prévoit d’utiliser davantage de composants issus des Red Bull RB19 et RB20, dont la suspension arrière et potentiellement d’autres systèmes clés. Une situation qui suscite des inquiétudes chez les rivaux, qui dénoncent une collaboration trop étroite entre les deux entités.

Pourtant, du côté de Milton Keynes, l’idée de cette réglementation ne semble pas provoquer de levée de boucliers. « Nous sommes prêts à nous adapter si la règle est adoptée », a indiqué un porte-parole de Red Bull, confirmant leur confiance dans leur capacité à relever le défi technique.

Aston Martin et Williams, actuellement dans la catégorie des équipes clientes, pourraient également être concernées si elles accèdent au Top 5 dans les prochaines années. Cependant, elles apparaissent mieux préparées à cette transition. Aston Martin, par exemple, investit lourdement dans ses infrastructures depuis 2021, ce qui pourrait faciliter une montée en indépendance technique.

Alpine face à un dilemme potentiel

Pour Alpine, qui deviendra cliente de Mercedes à partir de 2026 pour ses unités de puissance, cette règle pourrait prendre une tournure décisive. À ce stade, il semblerait que l’unité de puissance ne soit pas concernée par l’obligation de fournir toutes les pièces en interne. Toutefois, si la réglementation venait à inclure également les moteurs, cela pourrait forcer Alpine à repenser sa stratégie.

Dans ce scénario, l’équipe française n’aurait d’autre choix que de reconsidérer la possibilité de produire à nouveau ses propres moteurs pour répondre aux exigences réglementaires. Un retour aux sources qui serait coûteux et complexe, mais qui soulignerait l’importance stratégique des motoristes en F1.

Pour le moment, la direction d’Alpine, sous l’impulsion d’Oliver Oakes, a insisté sur sa volonté de rester compétitive, quel que soit le fournisseur : « Ce qui compte, c’est d’avoir le meilleur moteur possible. Peu importe l’origine, tant qu’il nous permet de gagner. ». De son côté, le PDG de Renault, Luca de Meo, avait justifié cette décision en insistant sur les impératifs financiers et la nécessité de recentrer les activités de Viry sur d’autres projets, comme les batteries solides et les supercars Alpine. Toutefois, il avait également admis que la F1 restait essentielle pour la marque Alpine.

Une règle qui suscite des débats

Cette proposition, bien qu’encore en discussion, soulève de nombreuses interrogations. Comment garantir que ces nouvelles exigences ne créent pas un fossé financier supplémentaire entre les écuries déjà bien établies et celles qui luttent pour se développer ? Et surtout, est-il réaliste d’exiger une autonomie totale en seulement trois ans ?

Si la règle est adoptée, la F1 pourrait se diriger vers une nouvelle ère de compétitivité, mais au prix d’une adaptation coûteuse pour les équipes clientes. En attendant, la bataille autour de cette réglementation s’intensifie en coulisses.