Le deuxième siège Red Bull, cauchemar du paddock ? Pierre Gasly décrit une réalité que peu osent affronter en public

La pause estivale de la Formule 1 est souvent le moment de faire un premier bilan. C’est dans ce contexte que Pierre Gasly, en commentant la saison difficile de son ami Yuki Tsunoda, a ravivé le débat sur le baquet le plus exigeant du paddock : celui de coéquipier de Max Verstappen chez Red Bull. Depuis sa promotion au sein de l’écurie mère, le pilote japonais enchaîne les contre-performances, une situation qui a contribué à faire glisser l’équipe à la quatrième place du championnat constructeurs.
Interrogé sur ce sujet, Gasly, qui a lui-même connu une rétrogradation brutale en 2019, a offert une réponse énigmatique mais lourde de sens, selon des propos relayés par The Mirror : « En parlant avec Yuki, je sais des choses qui ne peuvent pas être dites ». Ces mots sont une clé de lecture sur un système qui, selon de nombreux témoignages, semble programmé pour ne servir qu’un seul homme.
La première vérité que Gasly ne peut exprimer ouvertement concerne le matériel. Dans son interview, il a évoqué une situation où “ça ne peut pas tout à fait fonctionner comme vous le souhaitez”. Il décrit ainsi, diplomatiquement, le défi de piloter une monoplace développée par et pour le style de pilotage unique de Verstappen. Alex Albon, passé par le même processus, a décrit une voiture “sur le fil du rasoir”, dont les évolutions, dictées par les retours de Verstappen, la rendaient de plus en plus pointue et imprévisible pour tout autre pilote.
Ce que Gasly suggère, c’est que le second pilote n’est pas seulement en compétition avec son coéquipier, mais contre une philosophie de conception qui, par défaut, ne lui est pas favorable.
Gasly a également ajouté que “ce n’est pas facile d’être dans cette situation”, faisant référence à une pression psychologique malsaine, devenue la marque de fabrique du management de l’écurie. Être le coéquipier de Verstappen implique d’évoluer sous le regard constant d’Helmut Marko, dont les critiques publiques et les ultimatums sont des outils de gestion assumés.
Cette méthode crée un cercle vicieux : la difficulté d’adaptation à la voiture entraîne une baisse de performance, qui déclenche la pression médiatique, menant inévitablement à une perte de confiance et à des erreurs en piste. C’est un processus de déstabilisation qu’Alex Albon a admis l’avoir “détruit” mentalement.
Enfin, en se réfugiant derrière le secret professionnel, Gasly évoque la politique interne de l’équipe. Il sait, pour l’avoir vécu, que Red Bull s’est entièrement structurée autour de Verstappen depuis le départ de Daniel Ricciardo. Les “informations spécifiques” qu’il ne peut partager incluent probablement les promesses non tenues, comme celles qu’il avait reçues en 2019 sur des modifications de la voiture et la garantie de finir la saison. Le rôle du second pilote n’est alors plus de maximiser son propre potentiel, mais de s’adapter en silence à un système où il n’est qu’une variable d’ajustement.
Les non-dits de Pierre Gasly dessinent le portrait d’un système à trois étages : un défi technique face à une voiture conçue pour un autre, une épreuve psychologique face à un management impitoyable, et une impasse politique dans une équipe qui a fait le choix d’un leader unique. Mais l’arrivée de Laurent Mekyes pourrait peut-être tout changer.